Thesari Jetes

Friday, May 4, 2012

Stades : big is beautiful ?

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Stades : big is beautiful ?

"Je pense que le PSG doit définitivement déménager au Stade de France. Un grand club, c'est 80.000 supporters sans problème. Combien y en a-t-il au Real Madrid? À Barcelone?" Le sens de la mesure qui accompagne la fin de campagne de Nicolas Sarkozy devait forcément s'exprimer lorsqu'il fut interrogé par Canal+ avant Lille-PSG, notamment sur l'avenir du Parc des Princes. Ces propos sont anecdotiques et il ne s'agit pas d'en faire le sujet du débat, mais au moment où le destin du Parc va se décider, ils font un bon prétexte pour rappeler les enjeux et les données du problème – à commencer par celle de la dimension du futur lieu de résidence du club de la capitale.
À croire l'opinion du président de la République, le PSG serait déjà (par décret?) un club de l'envergure du Real ou du Barça, susceptible de réunir autant de spectateurs, et une capacité de 80.000 serait la norme à ce niveau. En réalité, les stades de cette dimension disposant d'un club résident sont une minorité en Europe: ajoutons au Camp Nou et à Santigo-Bernabeu les stades de Dortmund, Milan, Manchester ou Munich – dans des villes et pour des clubs dont la population des supporters et le caractère patrimonial interdisent les comparaisons avec Paris. De nombreuses méga-enceintes comme le Millenium à Cardiff, le New Wembley à Londres ou Croke Park à Dublin sont par ailleurs destinées à des usages événementiels, pour des manifestations sportives ponctuelles et différents types de spectacle.
COQUILLES PLUS OU MOINS PLEINES
On dénombre d'ailleurs plus d'équipements de 70 à 80.000 sièges notoirement surdimensionnés, comme les stades olympiques de Rome et Berlin ou le stade Loujniki à Moscou. Même San Siro émarge dans cette catégorie, tandis que la Juventus vient d'abandonner le Stade des Alpes pour une arène de 41.000 places contre 67.000 auparavant, pour un coût de construction très modéré de 120 millions d'euros... La contenance des stades de club les plus récents et les plus vantés s'étage entre 50 et 60.000 – fourchette dans laquelle se trouverait le Parc après sa rénovation: Stade du dragon (FC Porto, 52.000), Stade José Alvalade XXI (Sporting, 52 000), Veltins Arena (Schalke 04, 61.000), Emirates Stadium (Arsenal, 60.000), Amsterdam ArenA (Ajax, 51.000)...
Le graphique ci-dessus met en rapport la fréquentation des stades avec leur capacité pour les trente clubs les plus performants sur la scène européenne (selon le calcul de l'indice UEFA – classement qui présente l'inconvénient d'exclure notamment le Borussia Dortmund et son remplissage de quasiment 100% pour ses 80.0000 places). Derrière l'hyper-élite des six premiers, qui assurent un remplissage très élevé dans des enceintes King Size (Chelsea excepté), les situations sont disparates.
En fait, si les grandes enceintes offrent évidemment des possibilités d'optimiser les recettes de billetterie et de "jour de match", les enjeux résident largement ailleurs. Pour les stades eux-mêmes, dans leur offre de loges (infiniment plus rentables que les places lambda). Et pour les clubs en général, dans leur capacité à générer des ressources au travers du marketing ou des droits de télévision. Car la billetterie "de base" est moins cruciale qu'auparavant dans le mix de leurs revenus [1]. En France, les spécialistes doutent fortement de la viabilité d'une augmentation du prix des classes, compte tenu d'un réservoir de fans limité et pas immédiatement extensible aux classes moyennes supérieures (lire "Faire payer plus pour gagner plus?").
LE MESSAGE TAILLE
Pour connaître la "taille idéale" d'un stade pour le PSG, encore faudrait-il avoir plus de certitudes sur la pérennité de l'investissement de ses nouveaux propriétaires et sur son évolution sportive, afin de mieux mesurer la "taille" du club, son attractivité et ses besoins. S'interroger, aussi, sur les conséquences de cette évolution en termes de politiques tarifaires. Les promoteurs des grandes enceintes arguent souvent de la possibilité de mieux satisfaire la demande, voire de proposer des gammes de billets accessibles. L'exemple anglais ne crédibilise pas ces promesses: le "ticket d'entrée" (moyenne des billets les moins chers dans les stades de première division) y est le plus élevé d'Europe [2], et les tarifs d'abonnement n'y ménagent pas d'alternative meilleur marché pour le public populaire – au contraire de la Bundesliga où, par exemple, la place dans la tribune populaire du Borussia revient à une douzaine d'euros. Inversement, un stade relativement exigu peut contribuer à maintenir des prix élevés: en la matière, il s'agira toujours de choix de la part de part des dirigeants.
En réalité, la "juste taille" d'un stade se définit à partir de facteurs variés, parmi lesquels l'importance du bassin de population (lire "La taille compte") et celle du public potentiel. A contrario du parc de stades surdimensionnés construit au Portugal pour l'Euro 2004, la Suisse est citée en exemple pour son choix d'enceintes de taille raisonnable (pour la plupart entre 30 et 35.000 places) à l'occasion de l'édition 2008 de la même compétition.
Indépendamment de critères comme la visibilité et l'acoustique déplorables du Stade de France, le caractère de patrimoine du Parc des Princes, la volonté de QSI de contrôler la gestion de l'équipement, les enjeux très politiques mettant aux prises la municipalité, le propriétaire du PSG et le futur exploitant, ou encore la géographie francilienne des équipements sportifs (lire "Paris et la tentation de Saint-Denis"), l'argument de la taille n'en est pas un. En tout cas pas en faisant mine de croire que Paris est Barcelone – ou même puisse l'être un jour.
[1] D'autant que les experts du secteur anticipent une dématérialisation du spectacle sportif favorisant le développement de communautés globalisées de supporters qui consomment le football à distance – en particulier via les réseaux sociaux.
[2] À hauteur de 40 euros – lire l'article de Stadium Guide.

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